- Les filles ne se bousculent pas
- La pression sur les femmes mariées est forte
- Des mesures pour les femmes enceintes et allaitantes
De nombreuses femmes sont intéressées aux métiers de la mine mais elles font face à des contraintes qui les découragent. Des témoignages édifiants sur le sujet ont été recueillis dans le cadre d’une étude réalisée par la section Publiez ce que vous payez Afrique de l’Ouest francophone en 2018 sur le genre dans le secteur minier.
Les sites miniers sont installés en milieu rural, loin de la ville et des maisons d’habitation. Les travailleurs y passent de nombreux jours avant de revenir dans leurs foyers. Les femmes sont souvent absentes du foyer pour rejoindre le lieu de travail qui peut souvent atteindre 10 à 14 jours. Une véritable contrainte pour les femmes en ménage. « Un époux a exigé que sa femme choisisse entre le travail et le foyer parce que cette dernière manquait certaines fêtes et des évènements sociaux ; baptêmes, funérailles, mariages. Pour son mari, en tant que femme, elle devait être au foyer pour l’organisation », témoigne une femme. Cette perception de « femme au foyer » a des répercussions sur l’équilibre familial et social à long terme. Elle peut également influencer l’orientation scolaire et universitaire de la jeune fille qui préférerait les autres métiers à celui de la mine. Ce qui pourrait expliquer le faible nombre de filles qui embrassent les études dans ce domaine où qui travaillent dans le milieu. « Sous la pression familiale, certaines filles nouvellement mariées sont obligées de démissionner de leur poste dans les mines », rapporte une femme.
Déconstruire les comportements déjà installés n’est pas une chose aisée.
Les réticences de la société face à la présence des femmes dans le secteur minier industriel sont visibles. Le rapport 2016 de l’Initiative sur la transparence dans les industries extractives (ITIE) informe que sur 6.263 personnes employées dans les mines d’exploitations industrielles, 184 étaient des femmes, soit 2,93% de l’effectif total. On retrouve des femmes à tous les postes dans les mines industrielles, sauf au poste de premier responsable. Toutefois, les femmes sont plus nombreuses dans les postes administratifs ; secrétariat, finance, communication, restauration, hébergement, etc. plus que dans les métiers techniques.
L’effectif des femmes au ministère des Mines et des Carrières n’est pas non plus reluisant. En 2016, le ministère comptait 14,54% de femmes sur un effectif total de 165 agents. En 2017, le taux de femmes est passé à 16,23%.
Une bonne note toutefois. A la faveur d’un mouvement de cadres en décembre 2018, le ministre des Mines et des Carrières a confié des postes de hautes responsabilités à des femmes, dont le poste de Secrétaire général du ministère et de la Direction générale du cadastre minier.
Les quelques femmes qui excellent dans les sociétés minières rencontrent d’autres difficultés au moment de la grossesse et de l’allaitement. Certaines femmes perdent leur poste après les congés de maternité. Une société minière comme Iamgold Essakane permet à la femme enceinte de bénéficier du congé de maternité bien avant la date prévue. En période d’allaitement, les femmes ne peuvent pas emmener les enfants sur les sites. Sur ce plan, certaines sociétés minières ont pris des mesures afin de faciliter l’allaitement. Elles aménagent les horaires de travail pour favoriser les femmes dans cette situation et mettent à la disposition, une navette pour rejoindre les villes les plus proches où elles habitent avec leurs enfants. A ce niveau, le cas de Iamgold Essakane a été maintes fois cité au cours de l’étude. La mine accorde un congé de maternité supplémentaire à toute femme qui allaite. Pendant ce congé, la femme reste à domicile sans venir au travail tout en bénéficiant d’une demi-solde, avec l’assurance de retrouver son emploi à son retour.
Comment renverser la tendance ? Des propositions ont été faites dans l’étude. A propos de la disponibilité des données en temps réel, il a été demandé aux sociétés minières et au gouvernement de mettre en place un dispositif de collecte des données sur le genre en temps réel.
Les investisseurs miniers doivent tenir compte du genre dans les activités sur le site en prévoyant des commodités adaptées aux femmes. L’aménagement de crèches pour les femmes qui allaitent ou la construction de sites d’hébergement en dehors des sites d’exploitation pour les femmes qui allaitent sont de nature à encourager les femmes. Ils doivent mettre en place des politiques qui encouragent l’emploi des femmes afin de réduire les inégalités hommes et femmes. Les horaires de travail sur les mines peuvent également être revus afin de tenir compte des longues absences des épouses de leur foyer. Ce qui leur permettra de rejoindre plus régulièrement leur famille et surtout de réduire le temps de séparation avec leurs enfants.
Le gouvernement doit faire la publicité des expériences réussies afin de contribuer à sensibiliser les parties prenantes dans la prise en compte du genre. Encourager les jeunes filles à orienter leurs études dans les filières en lien avec la mine par l’octroi de bourses d’études et la facilitation des stages dans les sociétés minières serait une bonne initiative.
Elie KABORE
Encourager la fourniture des biens et services aux sociétés minières par les femmes
L’autonomisation financière des femmes peut provenir de l’accès aux marchés des biens et des services aux sociétés minières. Il s’agira de voir comment les femmes peuvent traiter avec les sociétés minières. Pour ce faire, des mesures incitatives peuvent être prévues pour plus d’impact sur les femmes qui investissent mieux le fruit de leur travail dans la famille que les hommes. Il faut trouver le moyen de favoriser leur implication dans les activités du secteur minier. Il est donc nécessaire d’engager une négociation avec les sociétés minières pour que les femmes entrepreneurs ou organisées en associations bénéficient de commandes : exemple, les intrants dans la restauration, les activités de salubrité des sites miniers, etc.
Source L’Economiste du Faso